De Joris Karl pour Boulevard Voltaire.
C’était un gros livre poussiéreux qu’une amie m’avait prêté à la fin du siècle dernier. Quelle divine surprise de le revoir dans les rayons !
Les éditions Tallandier rééditent « Le siècle de Louis XV » signé en 1933 par Pierre Gaxotte. Évidemment, le moindre prof d’histoire bobo vous sautera à la gorge si vous lui sortez cette référence. Et d’une, Gaxotte est un journaliste réac, sorte de Zemmour des années 30 ; et de deux, balayant d’un verbe dru les inepties scolaires, il réhabilite pan par pan le règne de Louis XV ! Si l’académicien Gaxotte vivait encore, Patrick Cohen ne l’inviterait pas, on peut en être sûr !
Courez acheter cette merveille ! Offrez-la à vos proches ! C’est un roman de la grandeur où l’historien nous conte l’apogée de la civilisation française. Nous l’avons oublié, car depuis des générations, l’école a jeté à la poubelle l’extraordinaire « siècle de Louis XV ». Comme quoi, un « mémoricide », ça marche…
Avant d’en disparaître (depuis 30 ans), Louis XV a été le personnage le plus insulté de toute l’histoire des manuels scolaires. Des générations d’auteurs ont tenté de l’abattre par le verbe. Ainsi, en 1956, on peut lire dans un manuel signé Lavisse et Conard : « Dans son enfance, il avait été maladif et on l’avait beaucoup gâté. Louis XV s’était donc habitué à ne penser qu’à son plaisir. Il fut dès sa jeunesse avare, moqueur et même cruel, égoïste et paresseux. » De 1880 à 1970, tous les livres de classe seront dans ce style : insultes répétées, accusations de complots, perversité supposée, etc. Évidemment, le Bien-Aimé était le produit de son époque, voguant entre une spiritualité profonde et la tentation de la débauche : le « parc aux cerfs », où bruissaient les nymphettes du roi, n’était pas politiquement correct, c’est clair…
Et pourtant… Son règne (de 1715 à 1774) est le second plus long de notre Histoire. La France est alors la première puissance mondiale. Doté d’une armée redoutée, jouissant d’une vigoureuse démographie (seules la Chine et l’Inde nous dépassent !), notre pays dispose d’une situation géographique exceptionnelle.
C’est la thèse centrale du livre : la France doit choisir entre le grand large et le continent. Abandonnant l’Inde et l’Amérique du Nord, Louis XV choisira la seconde option, préférant dominer l’Europe, alors centre du monde, comme feront par la suite Napoléon (qui vendit la Louisiane) ou de Gaulle lâchant le « boulet » algérien. Selon Gaxotte, la perte de l’empire n’était qu’un retrait tactique, en attendant de reconstituer une invincible flotte de guerre. Celle qui vaincra finalement les Britanniques dans la guerre d’Indépendance américaine ! Avec Louis XV, Gaxotte a pu dire qu’il n’y aurait « pas eu de Révolution », qu’il aurait maté les premières révoltes, réformant le pays progressivement. Très possible surtout quand on sait qu’il osa broyer les parlementaires de sa main de fer. Ce fut le coup d’État royal de 1771. Ça donne envie !
Mouais…
C’est aussi les errements jansénistes et le fait d’entrer en conflit larvé avec le parlement est une des plus grandes fautes de l’ancien régime puisque c’est de l’élite parlementaire que sortirons les thuriféraires de la Révolution!
C’est, de plus, une politique certes interventionnistes qui fait la grandeur de la France, mais d’autres part de multiples reculades devant les parlements (pas maîtrisé d’une main aussi ferme que cité ici) notamment sur le plan fiscale… Ce qui contribue a aboutir au paradoxe étrange qu’avec la société la plus riche d’Europe, la France soit le pays le plus endetté. A la fin du règne de Louis XV, l’Etat est presque en banqueroute, l’intervention aux Amériques -pourtant nécessaire le mettra a genoux- et contribue grandement a la Révolution.
Certes Louis XV n’a pas mérité la haine qu’il a suscité, mais il n’est pas non plus un grand souverain… un grandes parties des maux qui conduirons la France a 1789 trouvent leur source dans le règne de Louis XV.
je signale ce documentaire, que je trouve assez bon et honnête: